Justice.
Source :
N° 2832 - Rapport de Mme Valérie
:
Rapport défenseur des enfants décembre 2008
L’AFFIRMATION DES DROITS DE L’ENFANT
Adoptée
par acclamation par l’Assemblée générale des Nations unies le 20 novembre
1989 à New York, la Convention relative aux droits de l’enfant a été signée
par tous les États du monde et ratifiée par 192 États. Seuls les États-Unis
et la Somalie, qui l’ont signée respectivement en février 1995 et en mai
2002, ne l’ont pas ratifiée, mais ont signalé leur intention de le faire.
Cette convention solennise l’accession de l’enfant au statut de sujet de
droits.
La France fait partie du groupe des premiers signataires : elle a signé la
Convention le 26 janvier 1990 et celle-ci est entrée en vigueur pour la France
le 6 septembre 1990.
Cette convention, qui peut à juste titre être qualifiée d’universelle,
s’applique donc en France depuis près de quinze ans. La mise en œuvre des
principes qu’elle énonce s’est progressivement traduite par une évolution
de la législation française sur de nombreux points. Certaines situations
demeurent néanmoins critiquables au regard de ses stipulations.
LES DROITS DE L’ENFANT NE SONT PAS ENTIEREMENT RESPECTES
La Convention internationale relative aux droits de l’enfant. Avant même la Convention de New York, les droits de l’enfant avaient été l’objet de la Déclaration de Genève, adoptée par la Société des Nations en 1924, puis d’une déclaration approuvée à l’unanimité par l’Assemblée générale des Nations unies, le 20 septembre 1959. Mais le caractère déclaratoire de ces textes les privait de tout caractère contraignant. La Convention de New York ne se contente pas de conférer un caractère contraignant au socle minimal de principes définis-en 1959 qui insistait simplement sur la nécessité d’accorder à l’enfant une protection spécifique : elle pose le principe selon lequel l’enfant est une personne et, à ce titre, lui reconnaît des droits civils, sociaux et culturels, mais aussi des libertés publiques directement inspirées des droits de l’homme.
L’application de la Convention par le juge français
En vertu de l’article 55 de la Constitution française de 1958, les normes conventionnelles deviennent, une fois ratifiées, parties intégrantes du dispositif normatif et ont, sous réserve de leur application par l’autre partie, une autorité supérieure à celle des lois. Mais cela n’implique pas qu’un particulier puisse se prévaloir des droits proclamés devant un magistrat. Les juridictions conditionnent en effet la mise en œuvre des dispositions du traité à la reconnaissance de leur caractère auto-exécutoire.
Les juges français ont adopté une position prudente, et contrastée, sur l’applicabilité des stipulations de la Convention relative aux droits de l’enfant. Ainsi, la Cour de cassation s’est généralement, et jusqu’à une date très récente, refusée à considérer que les articles de la Convention, ou certains d’entre eux, puissent être considérés comme d’application directe par les tribunaux de l’ordre judiciaire, et ce, malgré les décisions contraires rendues par le Conseil d’État.
Donner à tous les enfants le droit d’être entendus par la justice.
L’article 12 de la Convention fait obligation aux États de garantir à l’enfant qui est capable de discernement le droit d’exprimer librement son opinion sur toute question l’intéressant. Il prévoit explicitement le droit d’être entendu dans toute procédure judiciaire ou administrative. Ce droit, associé à celui d’être informé, est aussi le premier à être reconnu à l’enfant par la Convention européenne sur l’exercice des droits des enfants.
Or, en France, selon l’article 388-1 du code civil, l’audition du mineur est possible lorsqu’il est capable de discernement, mais, si le mineur en fait la demande, elle peut être écartée par le juge par une décision spécialement motivée. Il ne peut être fait appel de cette décision de refus. Les enfants ne disposent donc pas réellement du droit d’être entendus avant toute prise de décision les concernant.
Commentaire : Il s’agit d’insuffisance du droit français dans ce domaine : « il faut, évidemment, donner à l’enfant, quel que soit son âge, la possibilité de demander à être entendu. Cette modification est fondamentale et devrait être faite depuis longtemps. Nous la demandons depuis deux ans. Il faut donc consacrer le droit pour l’enfant d’être entendu sans possibilité de refus du juge. De même, nous militons également pour qu’un avocat assiste l’enfant lorsqu’il est entendu dans une affaire le concernant où pour qu’il intervienne dans la procédure d’assistance éducative.
Garantir la continuité de l’accueil des enfants
Certains pays étrangers ont mené une réflexion approfondie sur les conditions d’accueil de l’enfant (Canada etc...). En France, plusieurs travaux récents ont attiré l’attention sur la nécessité d’assurer à l’enfant un projet de vie permanent. Cette réflexion conduit à s’interroger sur l’opportunité de prévoir un principe d’accueil unique, de limiter les recours aux pouponnières et de renforcer l’évaluation des mesures d’accueil.
La réflexion menée au Canada sur la stabilité de l’accueil de l’enfant
a) Poser le principe de la stabilité de l’accueil
Il est essentiel que les services chargés de la protection de l’enfance, lorsqu’ils prennent en charge un mineur, respectent la nécessité de favoriser un environnement sécurisé à l’enfant, pour qu’il puisse s’attacher à une figure maternelle. Certains départements ont d’ailleurs mené des enquêtes sur le devenir des enfants placés très jeunes, et, en Seine-Saint-Denis par exemple, les résultats montrent clairement que les enfants les plus équilibrés sont ceux qui ont été confiés à des assistantes familiales avec qu’ils ont tissé des liens affectifs proches d’une relation mère-enfant.
Commentaire : Nous insistons sur l’importance de la continuité affective et sur la stabilité des relations dans la toute petite enfance : « Une grande partie de l’avenir d’un enfant dépend de la confiance qu’il ressent dès les premières années de sa vie envers les adultes qui l’entourent. S’il a confiance, il apprend à attendre et à utiliser ses ressources propres.
L’ENFANCE
Les circuits de décision du dispositif de protection de l’enfance sont excessivement complexes, peu cohérents et difficilement compréhensibles par les usagers. Pourtant, les moyens ne manquent pas : globalement, 5,1 milliards d’euros ont été dépensés en 2004 pour la protection de l’enfance (contre 2,3 milliards d’euros en 1984, soit une progression de 122 % en vingt ans), et, dans certains départements, c’est le premier poste de dépenses de l’action sociale.
Mieux former et mieux encadrer les juges pour enfants.
La Mission considère que l’amélioration de la justice des mineurs passe par une reconnaissance de la fonction spécifique d’encadrement assurée par le vice-président du tribunal de grande instance chargé du tribunal pour enfants, et par une plus grande spécialisation de la formation des juges pour enfants. Mme ………… estime très important de revoir plusieurs aspects de l’organisation des juridictions et de mettre en œuvre un encadrement des pratiques judiciaires : « La formation doit être renforcée et la stabilité dans la fonction doit être défendue, alors qu’aujourd’hui la mobilité est importante et les carrières de juges des enfants peu encouragées. La fonction d’encadrement des présidents de tribunaux pour enfants doit être reconnue en instaurant des postes profils. Il faut enfin renforcer le contrôle des pratiques : affirmer l’obligation pour le juge des enfants de maintenir une concertation avec les partenaires ; augmenter, dans le domaine de l’assistance éducative, la disponibilité des parquets qui ont trop tendance à négliger le suivi des dossiers, happés par le nombre des dossiers au pénal ; mieux contrôler les dysfonctionnements judiciaires »
La formation des juges pour enfants paraît être indispensable pour parvenir à un travail en réseau plus efficace. Cette nécessité est rappelée par Mme……………: « Si nous voyons dans la polyvalence des magistrats une source de richesse, nous pensons toutefois qu’une attention toute particulière devrait être apportée à la formation des juges des enfants, en particulier à l’occasion des changements de fonction. Une formation d’une semaine et un stage très hypothétique de deux semaines dans le cabinet d’un collègue ne suffisent probablement pas à préparer à l’exercice de ces fonctions, d’autant que ces formations sont essentiellement tournées vers la procédure, plutôt que vers les problèmes auxquels le juge des enfants est confronté. II est par ailleurs nécessaire de donner aux tribunaux pour enfants les capacités de participer aux différents partenariats, en particulier avec les conseils généraux. Cette nécessité ne nous paraît pas suffisamment prise en compte dans l’évaluation des charges de travail »
Commentaire : Un juge peut ordonner un jugement et ne plus être en poste l’année suivante, on ne travaille pas avec des machines mais des enfants dont l’avenir peur dépendre du jugement.
Réduire les délais de jugement et veiller à l’exécution des décisions de justice
La modernisation des juridictions pour enfants demande également une réduction des délais de jugement
Propositions :
– prévoir une formation spécifique pour les juges pour enfants avant leur prise de fonction
– reconnaître les fonctions d’encadrement assurées par le vice-président du tribunal de grande instance chargé de présider le tribunal pour enfants
– prévoir la publication, par chaque juridiction pour enfants, de ses délais de jugement pour le traitement de l’enfance en danger, et se donner pour objectif de les réduire à trois mois